Un salut d’adieu au bienveillant CVD suivi d’une soirée en compagnie de Catherine, ultime représentante de la « mission E » encore présente à Dakar, et nous partons le mardi 30 mars au matin, direction les îles du Cap Vert, situées à quelque 350 milles du cap éponyme.
Le vent de secteur nord implique une navigation au près sur un seul bord pour rejoindre l’île de Sal -ainsi nommée en raison de l’importance de ses salines-, passage quasi obligé pour raison de formalités d’entrée. Heureux de retrouver le grand large, notre Alioth cavale à 7/8 nœuds sous un alizé de 15/20noeuds permettant de tracer sans mollir une distance de 200 milles en 24h.
Sous cette allure toujours un peu inconfortable et après notre long séjour fluvial, nous nous surprenons à devoir nous réamariner, réapprendre la gîte et nous réadapter au rythme des quarts de nuit. Notre pâle Grégoire couleur Viking souffre un peu d’un soleil sans pitié, Luc se fait mal (au pied bien sûr !) et Dominique se blesse à l’épaule gauche à l’occasion d’une mauvaise chute à bord…
Après avoir longé la surprenante côte orientale de l’île de Sal -aux formes si géométriques qu’on la croirait modelée de la main de l’homme- nous mouillons le jeudi matin à Palmeira, lieu a priori sans charme doté en toile de fond d’un dépôt d’hydrocarbures et d’un quai assez rustique destiné aux activités portuaires. Mais l’accueil à terre est très chaleureux et la musique omniprésente dans ce décor mi-Brésil, mi-Portugal.
Le vendredi matin nous décidons de reprendre nos documents de bord, déposés la veille auprès de la police maritime, afin de partir dès le vendredi soir pour rejoindre Sao Nicolau le samedi au lever du jour. Mais le calendrier semble en décider autrement car le Vendredi Saint est jour férié en terre capverdienne… L’idée de rester bloqués à Sal jusqu’au mardi nous séduit peu mais la complicité de la police nationale jointe à la bonne volonté de notre policier maritime retrouvé sur les quais en tee-shirt, bermuda et tongs, nous permettent de récupérer -sans passe-droit ni pourboire- nos précieux papiers dans des bureaux ré-ouverts spécialement pour l’occasion. Chapeau les capverdiens !
Nous serons moins chanceux dans une quête de radiographie destinée à diagnostiquer l’état de l’épaule de Dominique et qui nous conduira à Espargos puis à Santa Maria : les services des cliniques et hôpitaux sont fermés et, sur les conseils du Dr Luc, un bandage (de trois semaines…) fera finalement l’affaire. La visite à Santa Maria nous permet de découvrir le gigantisme des complexes touristiques de l’île qui, à proximité d’aéroport, s’insèrent entre plage idyllique et immensité désertique.
Forts de ces deux résolutions de problèmes, nous partons le vendredi soir comme prévu pour rejoindre à Sao Nicolau un magnifique mouillage ignoré des guides mais chaleureusement recommandé par Christian, notre co-missionnaire VSF. L’endroit est somptueux : la montagne dévale dans l’eau turquoise, la transparence de la mer révèle les fonds par 15m et une petite exploration en masque tuba ouvre l’accès à un très beau parterre de poissons multicolores. Malheureusement les vents dévalent de la montagne à la manière des « williwaws » patagoniens… et nous amènent à interrompre brusquement notre halte pour partir nous réfugier sur la côte Ouest, au mouillage de Tarrafal, où les vents persisteront à souffler à 35 nœuds durant 24h.
Là, les hautes montagnes arides creusées d’impressionnants canyons nous surprennent autant que le village de pêcheurs, quasi incongru, posé à leurs pieds. Nous apprécions merveilleusement cet endroit si imprévu : la gentillesse des habitants, la beauté du paysage, la venue à bord des pêcheurs auxquels nous ne saurons refuser ni le thon ni la langouste, l’inexistence du tourisme, les baignades en eau transparente … Tout aussi intrigante est la visite de la capitale voisine de Ribeira Brava située à 26km. Le transport se fait, comme partout aux Iles du Cap Vert, dans un « aluguer », très intelligent compromis entre bus et taxi. La traversée des montagnes, absolument splendides et vertigineuses, nous donne le sentiment d’évoluer en Cordillère des Andes. Quant à Ribeira Brava, elle a le charme d’un très touchant petit village de montagne : jamais visite de capitale se sera montrée si peu chronophage…
Au titre des observations :
- les Capverdiens sont réputés pour leur pauvreté mais leur niveau de vie est incontestablement bien supérieur à celui des Sénégalais du Siné Saloum,
- si les capverdiens gouvernent l’univers des épiceries, les bazars sont le monopole des chinois qui y offrent dans tous les villages des îles une gamme normalisée de vêtements en tous genres, équipements ménagers et produits de toilette,
- les églises évangélistes font flores et le tout petit village de Tarrafal compte à lui seul pas moins de cinq ou six institutions concurrentes,
- enfin, les phares et feux ont une caractéristique commune au Cap Vert : celle d’être tous éteints la nuit.
Le mardi 6 avril est une intense journée ménage-bricolage-carénage-matelotage durant laquelle le talentueux Grégoire apporte de nombreuses et précieuses compétences. Nous partons le lendemain matin, mercredi, pour l’île de Sao Vicente éloignée de 45 milles.
La trinquette que nous avons voulue sur emmagasineur nous pose toujours quelques problèmes structurels dont Grégoire fera tristement les frais au travers d’une déchirure musculaire qui ampute l’équipage -heureusement pour peu de temps- d’un nouveau bras gauche…
Le spectacle des îles de Razo, Branco, Santa Luzia et Sao Vicente longées par le nord est magnifique et l’arrivée entre Santo Antao et Sao Vicente au coucher du soleil est de toute beauté ; mais dans cette région réputée très poissonneuse, nous réussirons l’exploit d’arriver au port bredouilles...
Passé le vaillant « îlot des oiseaux », garde austère et puissant de la baie de Mindelo, nous entrons au mouillage face à un magnifique amphithéâtre de montagnes et un envoûtant environnement portuaire évocateur des années 50. Dans ce paysage digne d’une aventure de Corto Maltese, de merveilleux dessins et aquarelles glissent magiquement sous les crayons et pinceaux de Grégoire… L’annexe sait en tirer profit, et se fait gratifier sur ses boudins rebondis d’une signature du nom d’Alioth superbement exécutée par l’artiste du bord.
Le samedi et le dimanche nous embarquons sur le « Mar D’Canal », ferry qui joint Sao-Vicente à Santo Antao. Nous passerons deux jours sur cette île merveilleuse en appliquant tous les bons conseils de notre ami Christian… dont celui d’acquérir un bon vieux « grogue » (le rhum capverdien) et quelques kilos des délicieuses pommes de terre locales. Après la grandiose platitude du fleuve Saloum et de ses paysages de mangrove, la verticalité tourmentée des paysages de l’île nous bouscule quelque peu. C’est en « aluguer » que nous explorons la partie nord-nord-ouest, la plus verdoyante de l’île qui est un peu le jardin potager de toutes les îles du Cap Vert. Dominique et Grégoire enrichiront courageusement le parcours à l’occasion d’une belle ascension en montagne en guise de mise en jambes le dimanche matin.
Distillerie artisanale
De retour à Mindelo, nous nous inscrivons dans une nouvelle phase de préparation d’un départ qui devrait avoir lieu dans le courant de la semaine et dans cette attente, la dynamique Alliance française locale nous fait bénéficier de son excellente connexion Internet.
Sous le charme de ces îles magnifiques que nous aurons quelques difficultés à quitter, nous avons une pensée pour Jérôme (Soly) qui suggérait un séjour de deux à trois mois pour prendre la vraie mesure des îles du Cap Vert…
Mention spéciale à l’intention des saint-vaastais
Nous signalons avoir relevé deux véhicules tout à fait suspects le dimanche 11 avril sur l’île de Santo Antao. Toute personne susceptible d’apporter des réponses à l’une et/ou l’autre des interrogations suivantes est priée de bien vouloir se manifester sur www.team-alioth.fr
Indice 1 – Arielle rôderait-elle incognito sur les pas d’Alioth ?
Incice 2 – Les frères Pinteau contourneraient-ils la réglementation européeenne en venant pêcher en eaux capverdiennes ?