Jeudi 24 avril à 20h, à l’approche des côtes, la nuit est sans lune. Nous laissons à tribord l’Ilot Infernal pour suivre sur cinq petits milles l’alignement à 59° qui mène au mouillage bien abrité de Kuto, sur la côte ouest du joyau calédonien de l’île des Pins. Partis le samedi 19 avril en début de matinée de la Baie des Iles (Nouvelle-Zélande), il nous aura fallu cinq jours et demi pour effectuer une traversée assez conforme aux prévisions : vents de secteur nord-ouest dictant une remontée au près bâbord amure, puis rapide traversée au moteur d’un zeste de zone anticyclonique pour finir sous le train des alizés de sud-est qui nous mène tribord amure à notre objectif. Moyenne de 20 nœuds de vent et sortie de toute la garde-robe d’Alioth, à l’exception de l’ORC et du tourmentin. Si nous avons un petit regret pour l’île australienne de Norfolk laissée sur le bâbord de notre route, nous sommes heureux des conditions de navigation de cette première traversée de la saison six et de l’état général du bateau. En effet, à l’exception d’une légère fuite du dessalinisateur et d’une petite défaillance de refroidissement du moteur de l'annexe, nous sommes bien proches du «tout est tombé en marche » cher à notre ami Alain (Uhambo), le philosophe-expert de la technique marine.
A notre départ, la baie des Iles est désertique et le vol planant de deux grands albatros semble nous signifier, une dernière fois, la solitude et la sérénité de cette terre de Nouvelle-Zélande si éloignée du monde. En réplique à ce prélude, les pétrels et puffins, nous réjouiront, tout au long de notre route, de leurs gracieux spectacles aériens. De façon moins poétique mais beaucoup plus gastronomique, deux dorades coryphènes rejoignent le bord au bout de la toute nouvelle canne à pêche de Luc. Pour parodier un des dictons favoris de mon Grand-Père, je dirais volontiers : « Noël à l’hameçon, Pâques au poisson » !
Par chance la mer n’était pas trop agitée et nous avons pu déguster ces superbes prises, au four, à la mayonnaise, à la sarde, cru aux avocats, à l’asiatique, en ceviche… Un festival !
Du côté de l’équipage, Dominique, après un démarrage en petite forme, semble maintenant totalement remis. Luc qui s’est, dès le premier jour, écrasé un doigt dans le rabattant des ballasts, est, lui aussi, en voie complète de guérison. Outre ce florissant tableau médical, nous avons vécu six grandes et belles journées et nuits de mer en compagnie de Pierre-André qui a apporté à bord ses qualités d’excellent marin, son dévouement pour la vaisselle, son amour du bridge et de la pêche, ses ressources musicales et un intérêt naissant pour la cuisine en mer.
Nous débutons notre séjour calédonien par deux journées type « l’île de vos rêves » à l’Ile des Pins : une escalade du sommet de l’île (262m) où Dominique a prouvé sa forme retrouvée ; un hommage aux communards sur le site du bagne et une visite de la grotte de la reine Kanak Hortense, pour le côté culturel ; une baignade dans la paradisiaque piscine-naturelle-aquarium-géant située au nord-est de l’île et des rafraîchissements servis dans les hôtels**** pour le côté catalogue du Club Med.
Nous retrouvons là la magie de la végétation tropicale, le respect dû aux sites sacrés (tabus) et le sens de l’accueil polynésien lorsqu’à Vao les femmes du village nous invitent à déguster les plats confectionné à l’occasion d’un concours de cuisine traditionnelle : bugnas de légumes, de viandes ou de poisson cuits dans les feuilles de palmiers dans des fours enterrés, crabes de cocotier et coquillages,….
Moi j’ai tenté le bugna aux escargots accompagné d’ignames et de taros. Pas mal !
Et remarquez l'élégance de l'assiette jetable.
Dimanche matin, nous reprenons notre route vers Nouméa qui se trouve à 65 milles de là. Une journée parfaite : soleil, vent, majesté des paysages ET pêche d’un thon blanc. Cette partie sud-ouest de la Calédonie est très sauvage. La terre est rouge et des sommets aux rivages, une forêt dense envahit le territoire sur lequel l’œil ne décèle aucun habitat. Nous faisons une escale dans la baie déserte de Uié et repartons le lundi matin pour rejoindre Port Moselle, la marina de Nouméa où nous recevons un accueil professionnel et chaleureux. Chaud aussi : le thermomètre affiche plus de 30° en milieu de journée !
Pierre-André met les mains à la pâte.
Durant toute cette période nous sommes tout particulièrement proches de notre ami Jean-Pierre qui, de Basse-Normandie, alors que nous menons la belle vie aux antipodes, veille discrètement sur les travaux de la maison d’Arielle et Dominique, assure la gestion administrative de Christiane et Luc et fait l’impresario artistique pour notre amie Cécile !
Nous comptons passer une huitaine de jours sur la Grande Ile. Pierre-André qui profite de sa venue pour prendre quelques contacts professionnels -au café de la marina, bien sûr !-, devra déjà nous quitter lundi soir et c’est à trois que nous poursuivrons notre route vers le nord : îles de la Loyauté, Vanuatu, Salomon… puis vers l’ouest : Papouasie-Nouvelle-Guinée, Australie (Darwin), Indonésie…
Amitiés Kanaks avec des pensées toutes particulières pour Anne-Sophie et le team Guinard.
Le team Alioth
PS : d'autres photos sur l'album S6 1 - Début de saison 6