Voici trois semaines qu’Alioth séjourne à la marina de Pointe à Pitre, après avoir abandonné tout espoir d’aborder les rivages des îles voisines. Le puzzle des réparations et livraisons enferré dans le dédale des longs week-ends de ce joli mois de mai à la française a en effet rapidement eu raison de nos projets de sortie vers les Saintes et Marie Galante. Dominique en a justement profité pour prendre une dizaine de jours de grand air en métropole dans l’attente d’un départ des Antilles pressenti pour le 29 mai.
Cette station un peu forcée aurait pu se faire longue d’autant que le temps est chaud et humide à la marina de Bas du Fort. La proximité entre les bateaux s’y mesure à l’épaisseur de la défense dans une ambiance animée en cette période où les uns descendent vers le sud pour fuir le risque de cyclones alors que d’autres, dont nous sommes, préparent leur retour vers les Açores et la vieille Europe.
Mais nos disponibilités temporelles se faisant généreuses, nous savourons le merveilleux accueil de nos cousins Christiane et Arnaud nichés dans un petit paradis de verdure tropicale caressé par la brise rafraîchissante des hauteurs de Saint-Claude (Basse-Terre). Nous immisçant sans scrupule dans leurs emplois du temps étoffés de créatrice-cheffe d’entreprise et de radiologue public-privé-Basse-Terre-Grande-Terre, nous aurons usé et abusé de leur hospitalité durant trois longs week-ends placés sous le signe de la culture, de la musique, du tourisme, de la plongée, de la marche, des baignades et de la gastronomie : ti-punch et boudins antillais, poissons et langoustes grillées, sans oublier les spécialités d’Edith au nombre desquelles la daurade créole, les gratins de christophines… et le fameux colombo autour duquel nous avons joyeusement célébré le mariage des petits cousins Anne et Louis-Marie à quelque soixante degrés de longitude des festivités officielles.
Tandis que je me familiarise avec la cuisine créole auprès d’Edith qui fait mourir[2] ses petits légumes au fond de la cocotte, Luc, sous l’œil averti de Monsieur Saint-Louis, affronte la végétation tropicale machette à la main. En bref, nous voici tombés sous le charme inédit d’une escale placée sous les bonheurs conjugués du bateau de plaisance et de la maison de vacances familiale...
Pour me faire politiquement plus correcte que dans l’article précédent, je n’oublierai pas de souligner la venue très officielle du président Hollande et de sa suite, le 10 mai 2015, à l’occasion de l’inauguration du Mémorial ACTe, bâtiment aussi ambitieux qu’élégant érigé dans l’avant-port de Point à Pitre. Si, du cockpit du bateau, nous bénéficions du spectacle du feu d’artifice qui clôture brillamment la journée d’inauguration, nous regrettons de ne pouvoir accéder aux expositions de ce splendide espace dédié à la mémoire de l’esclavage : compte-tenu de sérieux retards de construction, ses portes n’ouvriront qu’au mois de juillet. Après un tour du monde dont la quasi-totalité des escales fut marquée par ce douloureux sujet, nous aurions apprécié une visite qui se présentait comme un point d’orgue historique à notre cheminement. Dans l’île, la réalisation de ce magnifique projet n’est pas sans susciter de nombreux débats, certains s’agaçant d’un investissement de 83 millions d’euros totalement inapte à résoudre les problèmes d’alimentation en eau potable qui frappent un grand nombre des habitants de l’île.
Arnaud et Christiane nous auront chacun fait l’honneur de venir saluer Alioth qui, faute d’avoir pu tirer quelques bords en chœur, en fut fort honoré. Le 26 mai Dominique rentre de métropole et le 27, grand jour de commémoration de l'abolition de l’esclavage en Guadeloupe, c’est notre amie Cécile qui nous rejoint pour nous accompagner jusqu’aux Açores. Non pour sculpter les Hommes d’équipage comme elle l’a fait sur un cargo de la CMA-CGM il y a quelques années, mais pour revisiter la route des Antilles à la voile et tester les plaisirs de la navigation. Gageons que les conditions météorologiques et nautiques lui permettront de profiter au mieux de cette expérience.
Pour conclure, nous aurions aimé évoquer les nombreux amis de Christiane et Arnaud que nous avons eu le plaisir de rencontrer au cours de nos séjours mais la place nous manque pour toutes et tous les citer. En les remerciant des bons moments que nous avons pu partager, nous leur disons très amicalement « A dans d’autres soleils ! » en métropole ou aux Antilles, selon.
[1] Au-revoir (jolie expression créole que nous devons à Arnaud)
[2] Faire revenir en créole
[3] Nom du groupe d’Arnaud - FAYA pour Fred, André, Yannick et Arnaud
Et puisque vous êtes nombreux à apprécier les dessins et peintures de Monsieur QQ, j’ai le plaisir de vous informer que mon cher neveu, co-auteur d'Alioth, du rêve à l'Atlantique sud, expose à Rennes début juin.